
Nombreux sont ceux qui aiment jouer sur les diverses plateformes par internet et qui ont tendance à privilégier ce mode, mais que se cache derrière le côté numérique des échecs quels en sont des effets pour chacun et est-ce mieux ou moins bien que les échecs traditionnelles en bois jouées en direct en présentiel des deux antagonistes?
Au risque de fâcher certains adeptes, je vais essayer de répondre de mon point de vue à ces questions.
L’informatique a apporté une aide, facilitant le répertoire des parties et des variantes ainsi que leur consultation. Avec l’internet, le regroupement de ces informations et le développement des plates-formes échiquéennes pour jouer en ligne, le monde s’est rétrécit et les frontières sont tombé. Les cours vidéo et directs en ligne se sont multiplié à grande vitesse. Mais…
Pour certains ce mode est devenu principal. On opère la souris de l’ordinateur, on touche son écran plat du téléphone ou de la tablette tactile en opérant les diagrammes aussi plates en 2d. On ne voit pas son adversaire et on se cache soi-même derrière un pseudo. Pour communiquer, il faut ouvrir la fenêtre de tchat et taper le texte sur le clavier, lui aussi virtuel, c’est fastidieux. On n’en a ni le gout, ni l’odeur, ni le toucher! Le plus souvent, on joue une partie ou un coup entre deux tâches, on est dispersé, on ne mène à bien ni l’un, ni l’autre. On ne prends plus de temps et de la patience pour y faire attention, approfondir sa réflexion et la vision de ce qui se passe dans le jeu et on commence à brasser des milliers des parties aussi rapides que notre impatience, sans en retenir le contenu et sans pouvoir y revenir car trop nombreux. On fait du zapping aux échecs, comme à la télé, réseaux sociaux et sa vie.
Le joueur a joué sur Lichess 5500 parties en 1 an, toutes mélangées en cadence et styles, cela fait en moyenne 15 parties par jour. Quoi? Il n’a rien fait d’autre de ses journées? La plupart de ces parties sont des blitz. Combien de celles-ci a-t-il retenu? Combien en a-t-il analysé en profondeur? Pas beaucoup, en tout cas, car son niveau n’a globalement pas bougé.
On dit qu’il faut être en phase avec la modernité. On se colle à son écran. On démarre son logiciel ou sa plateforme. On opère un diagramme schématique et plat. On sent dans sa main toujours la même forme arrondit de la souris ou biens on touche la même platitude de l’écran tactile. L’ensemble est si vilain, qu’on a du mal à le visionner pendant des heures que durent les parties sérieuses. Associé à l’hyperactivité générale, le manque de temps et l’impatience nous pousse à jouer vite. On se met à survoler les parties, la profondeur des calculs et la réflexion détaillée demande du temps. Et si la partie dure, on décroche et on se plein de la lenteur de la réflexion de l’adversaire. On perd le fil conducteur, le sens et la direction entrepris. C’est comme dans le TGV, les paysages défilent à la fenêtre, mais on ne les voit pas.
Ou on reçoit un ami chez soi. On sort un beau jeu en bois, on ouvre la boite, on sort et installe les pièces qui ont une odeur de bois, le toucher est agréable, c’est chaleureux. Les pièces feutrées glissent sur le plateau, le geste qui accompagne traduit le sentiment du joueur qui devient palpable. Tantôt une prise dynamique et décidée s’accompagne du bruit de craquement d’une pièce contre une autre. Tantôt la pièce est poussée presque sans bruit, délicatement et avec prudence. On voit en trois dimensions avec une réelle perspective, les pièces qui pèsent leur poids vont en avant au lieu des symboles qui ne se déplacent que virtuellement vers le haut avec un bruit artificiel, toujours le même ! Les sentiments sont saisissants, on les ressent en direct, les associe avec le jeu de la personne en face. Une fois la partie terminée, on se met à discuter de façon animée ce qu’on vient de vivre. Et on vient de vivre une vraie tempête. Aussi riche en contenu qu’en sentiments des deux participants. On vient de vivre un vrai spectacle dont les deux ont été metteurs en scène, acteurs et spectateurs à la fois.
Quel mode préfériez-vous de choisir? Moi, je penche pour ce dernier. C’est celui-ci qui vous fera profiter pleinement de tous les bienfaits de ce jeu merveilleux développant en tout un chacun de nombreuses qualités humaines. L’informatique ne doit rester qu’en tant que ”aide”! Ou plongeriez vous dans le virtuel ? À vous de choisir…
Andrei Kleimenov 2022
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